2 septembre 2001

On quitte déjà le Chili. Un mois, c’est vite passé. On n’a même pas été dans les déserts du nord! Passage de la frontière, le poste de douane est planté au milieu des espaces infinis. Lionel se réjouit déjà. “Les gens racontent n’importe quoi, ce n’est pas cher l’Argentine, ça fait déjà 10 minutes qu’on y est et on n’a toujours rien dépensé. Si je calcule notre moyenne quotidienne, ça fait zéro Francs.”

Rio Gallegos, on attend le bus pour El Calafate. Là Lionel déchante vite. 21 pesos (=21dollars) chacun pour les 320 km. On a quitté le Chili! A 20h00, le bus démarre. C’est drôle, c’est la nuit et pourtant il reste beaucoup de clarté. C’est dû à la neige mais pas seulement, on voit le ciel assez clair à l’horizon. On arrive à 1h00 du matin, c’est rude! Une nouveauté nous attend: chauffage dans notre chambre. On ne va pas se cailler!

3 septembre 2001

Sandwiches au jambon, fromage, escalope et mayonnaise au petit déj’ et en route pour le Perito Moreno! On traverse d’abord la plus petite estancia de la région, Santa Lucia je crois. Elle fait tout de même 3500 hectares. Mais c’est vrai que comparée à la plus grande, c’est riquiqui, il faut dire que les 300000 hectares et 40000 têtes de moutons de l’estancia El Condor, ça en impose… Et à qui c’est cette grosse estancia située plus au sud de Rio Gallegos? A Luciano Benetton! Il faut dire que la région de Santa Cruz est de la taille du Portugal plus la moitié de l’Espagne avec seulement 177000 habitants, mais mêêêê… 4 millions de moutons! Le problème, c’est la chute du cours international de la laine. A part ça ils exportent plein de lièvres vers l’Europe. Ce sont des lièvres grands comme des chiens taille cockers. Aujourd’hui, on a eu du bol, on bénéficie d’une super journée ensoleillée avec une vue dégagée de la Cordillère. Il parait qu’il y a 10 belles journées comme ça par an! Ici, il fait maxi 25 degrés l’été et 5 degrés l’hiver. Et moins 15 minimum. Cet hiver, ils ont eu un froid polaire terrible qui les a privés de gaz, eau, électricité. Tout avait gelé.

Les paysages sont surprenants, désolés, immenses, arbres tourmentés, puissants mais râblés, végétation basse et écrasée, il a dû y avoir de la neige. Ca me fait un peu penser à l’atmosphère des villes de chercheurs d’or dans “Croc Blanc”… On longe le Lago Argentino, le troisième plus grand d’Amérique du Sud (le plus grand étant le Titicaca) et le premier d’Argentine par sa superficie (1550 km2). Il a une belle et surprenante couleur bleue laiteuse dûe aux sédiments apportés par les glaciers qui l’alimentent. On y aperçoit des flamands roses au loin. PLusproches, de superbes faucons charognards et des oies sauvages toujours en couple. La femelle est brun-rouge, le mâle blanc et noir magnifique. Si l’un des deux meurt, l’autre meurt de chagrin, du moins c’est ce que nous a raconté notre guide un peu chauve et sympathique. On revoit aussi les beaux oiseaux vus à Valdivia, avec un long bec recourbé, gris et jaunes et qui cancannent. Ce sont des ibis! Et puis, on ne les voit pas, mais il y a aussi des saumons et des truites dans le lac. Des alevins ont été apportés d’Europe il y a longtemps et voilà qu’on trouve maintenant des truites géantes! Une grosse truite en europe est considérée comme normale ici, le record est de 14 kg pour 1m20!!!

L’ensemble du parc national, ses lacs et glaciers, ses 600000 hectares, forment la plus grande réserve d’eau douce du monde. Il est d’ailleurs classé monument du patrimoine mondial. Ici, il y a une devise qui tient en trois phrases: ne prenez rien sauf des photos, ne laissez rien sauf l’empreinte de vos pas, ne tuez rien sauf le temps. Il faut dire qu’ici, ils sont sensibilisés à l’écologie. La région est celle d’Argentine la plus touchée par le cancer de la peau. Ils ont même commencé depuis peu à trouver des animaux atteits de cette maladie. Ici la couche d’ozone est fine, très très fine.

On roule à travers le parc, ses arbres brûlés par le gel et le vent quand soudain le silence se fait dans le minibus. On est tous bouche-bée. Le voilà, le glacier Perito Moreno. Il semble à portée de main mais il est à 8km. Enorme, il est énorme! 4km de large, 35 de long. 40 à 80 mètres de hauteur selon les endroits, 100 à 120 de profondeur, il repose sur le fond du lac. Il couvre 257 km2!!! 257 km2 de glace sans pastis, quel gâchis.

On est maintenant dans un bateau au pied du glacier. Il semble de plus en plus grand. Il est magnifique, crevasses, grottes, fissures partout. On dirait une succession de pics et de creux très très hauts et profonds. Et tout ça dans de très beaux tons de bleu et blanc, blanc-bleuté. Un craquement énorme qui résonne dans le glacier et sur la coline qui l’arrête et on voit un pan entier de glace se détacher du mur et s’écrouler lentement dans l’eau 30 mètres plus bas. Une énorme gerbe d’eau jaiilit, reste suspendue, retombe. L’onde se propage rapidement et forme des vagues qui nous secouent. Enfin l’iceberg tout neuf fait surface, du moins pour le cinquième de sa surface. Un petit bout de l’aire quaternaire vient de s’effondrer sous nos yeux.

Puis nous allons observer la bête d’en haut. Piquenique face au glacier. Les péíements des oiseaux, le souffle du vent dans les sapins et ses sifflements lorsqu’il s’engouffre dans les méandres du glacier sont troublés par des coups de fusil et d’énormes coups de tonnerre. Les premiers, ce sont de petits bouts de glace qui se détachent et tombent dans l’eau. Ca résonne tellement qu’on dirait un coup de fusil. Les seconds, c’est quand un pan du mur de glace s’effondre. On a eu la chance d’en voir envore 3 tomber. Et sans cesse, les craquements du glacier qui avance. C’est la particularité du Perito Moreno, c’est le seul glacier qui avance encore. Les autres régressent. Enfin, il s’est peut-être arrêté maintenant. En tout cas, il ne régresse pas. Il y a peu, il avançait de 2 mètres par jour au milieu et de 40cm sur les côtés. Ce qu’on a vu, c’était tellement chouette et surprenant que ce n’est pas facile de le faire partager…

Ce soir, on mange des pâtes. Hé oui, c’est Lionel qui cuisine alors il a le droit de faire le menu. “Et avec ça ma ptite dame?” Une entrecôte de boeuf, on est au pays du meilleur steack du monde oui ou non?

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